Hommage au Professeur Julien Barry
Prof Julien Barry Inserm – Lille 1981
Monsieur le Professeur Julien Barry nous a quitté le 14 mai 2004 à l’age de 85 ans.
Médecin, issu de l’Ecole des Services de Santé Militaire de Lyon, il s’est très vite passionné pour l’Histologie et a soutenu sa thèse de médecine sur les cellules argentaffines de l’épithélium intestinal, juste avant d’entrer dans la résistance.
Sa rencontre avec Rémy Collin, neuroendocrinologiste et humaniste de renom, professeur à l’Université de Nancy, à qui il avait demandé un entretien pour lui soumettre un essai sur la connaissance scientifique, sera pour lui une étape majeure de sa vie. Reçu par la famille, il sera conquis par les travaux du père et subjugué par la personnalité et le charme de la fille, qui deviendra Madame Barry. Sa passion pour la neuroendocrinologie doit donc beaucoup au Professeur Rémy Collin et, dès lors, tout en assurant ses tâches médico-militaires, Julien Barry se lancera avec passion dans des travaux de recherche. Il les mènera le soir et la nuit et les poursuivra lorsqu’il se retrouvera affecté pour un an en Indochine. De retour à Nancy en 1952, il est reçu à l’agrégation de médecine et réalise ses premières découvertes dans les années qui suivent. Après treize années passées comme médecin-capitaine, il entre dans la vie universitaire en étant nommé Maître de Conférence en Histologie-Embryologie à la Faculté de Médecine de Besançon en 1956, puis Professeur à Alger en 1960. En Septembre 1962, il est nommé à Lille, où il caresse l’ambition de redonner à l’histologie lilloise la place qu’elle occupait du temps du Professeur Laguesse. Il y passera le reste de sa carrière, avant de prendre sa retraite sur les rives du lac d’Annecy.
Le nom de Julien Barry est, dans le monde scientifique, associé au système à gonadolibérine (LHRH puis GnRH), dont il a été le premier, avec l’aide du Docteur Maurice Dubois et de Pierre Poulain, à localiser les corps cellulaires chez son modèle animal préféré qu’était le Cobaye. Sévèrement mis en doute, ses résultats furent par la suite reconnus par la communauté scientifique internationale et ses travaux ultérieurs ont permis de caractériser le système à GnRH dans de nombreuses espèces et dans des circonstances expérimentales et physiologiques diverses.
Julien Barry a également mis en évidence chez le Cobaye un groupe distinct de neurones qu’il dénomma noyau hypothalamique latéro-dorsal interstitiel (NHLDI), pour lequel il suggéra une implication dans les fonctions de reproduction. Le rôle exact de ces neurones restera pour lui un sujet d’interrogation et en 1999, il finançait encore personnellement des recherches pour tenter de découvrir les molécules spécifiques qu’ils pouvaient synthétiser.
Julien Barry est à l’origine de la création de l’Unité INSERM 156 en 1976. Il a su transmettre son intérêt pour la neuroendocrinologie à ses élèves, dont certains poursuivent actuellement leurs recherches au sein de l’Unité INSERM 422. Avant-gardiste et visionnaire dans les concepts, toujours à l’affût des possibilités nouvelles, son objectif, original pour l’époque, était d’intégrer au sein de son Unité des spécialistes de différentes disciplines (biochimie, électrophysiologie, biologie moléculaire) afin de compléter une recherche à l’origine purement morphologique.
En dehors de ses talents de chercheur, Julien Barry a été un enseignant innovant dans les méthodes, très apprécié des étudiants. Plusieurs promotions de médecins se souviennent de ses cours passionnants, qui, tout en étant très didactiques, ne cessaient de faire référence aux découvertes les plus récentes.
Julien Barry est l’auteur de plusieurs ouvrages scientifiques et philosophiques et en 2000 il a publié sa biographie dans laquelle il nous livre avec son franc-parler les leçons qu’il a reçues de la vie (La Bourlingue, éditions Cêtre).
Passionné, assoiffé de savoir, Julien Barry a été un chercheur jusqu’à la fin de sa vie et il y a moins d’un an, il passait encore à l’Unité 422 pour s’informer des dernières avancées scientifiques et pour imaginer des stratégies permettant de répondre à ses nombreuses interrogations. Si beaucoup de ses élèves lui doivent énormément sur le plan personnel, l’ensemble de la communauté scientifique ne peut que lui être reconnaissante pour ses travaux qui ont apporté des données définitives sur la connaissance du système à GnRH. Julien Barry, en tant que pionnier de la neuroendocrinologie de la reproduction, a été l’un des membres fondateurs de notre Société et nous avons eu le plaisir de l’avoir comme Président d’honneur au cours de sa 27ème réunion, qui s’est déroulée à Lille en Septembre 1998. Ceux qui l’ont connu garderont de lui l’image d’un patron dynamique, disponible, à la grande ouverture d’esprit et à l’humeur constante.
Jean-Claude Beauvillain, Pierre Poulain et Maryvonne Warembourg (Inserm U 422, Lille)